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Au choix sur l’image, parmi les personnages qui ont une histoire de Pomme

La sorcière

1- Auto-portrait 10 minutes, atelier d’écriture Solid’ailes

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Mon âge ne comptait plus pour moi, mais j’entendais bien les chuchotements sur mes 387 ans.

Avoir réchappé aux bûchers, à l’inquisition, à la foudre des villageois, vivre au milieu de mes chers souvenirs, mes grimoires sacrés, avec mon éternel chat noir se réchauffant près du chaudron.

Qu’importe mon dos courbé, les saisons et les années, je les savais immuables seulement perturbées par ma tendre forêt diminuant, mes prairies qui s’assèchent irrémédiablement et la ville qui gronde et vrombit.

Maudite ville qui sans cesse me fait fuir encore et encore, toujours plus loin pour trouver un semblant de cœur de forêt que je partage avec ceux qui me sont chers, tantôt le cerf et ses biches, tantôt la laie et ses marcassins, les champignons, les elfes. Tous, que l’on est à fuir les bruits humains, les chasseurs approchants et bien pire les we piétinants et massacrants.

2020 cependant me rappela étrangement 1788, une paix indicible….

2 –Rencontre avec la pomme

Contrainte : Assonance utilisation du S sorcière : son S, en 10 minutes

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Sifflotante et souriante à la vie, voilà que, comme tous les samedis, matin et soir c’était maraude.

Je serrais ma sacoche en bandoulière, desserrais le dosseret lorsque nécessaire et y faisais entrer les précieuses réserves saisonnières.

Je rêvais à quelques cerises tardives et sucrées, quelques baies solitaires encore solidement accrochées au rameau et point encore ensorcelées.

Ce fut suave surprise, dans le sous-bois, il était là, beau grand et fort, cime vers le ciel,surplombant quelques jeunes saules, presque les sabots dans l’eau, non-surpris il m’entendit arrivé et se tourna vers moi, surveillant ses reflets de soleil dans le ruisseau voisin.

Il me fit signe

J’osais à peine approcher, le géant se pencha, m’offrit ses fruits, des pommes vertes grises, sans douceur, croquantes, cassantes et causantes sous la dent, glissantes sous la lame encore acérée du canif ressoudé

Une plus particulièrement me troubla, saine et sauvage, presque inaccessible, alors je la cueillis avec tendresse.

Par habitude, je tranchais la pomme en deux non comme le commun des mortels mais en coupe de sorcière, l’homme debout si tenait, pomme était simplement magnifique et luisait de son sucre sous la coupe.

Je ne pus que remercier, remplir la gibecière à la ceinture, mais pas trop : en laisser pour chacun à sa faim est de mise.

La cueillette en conscience s’éternisait en rituel de passage : la saison avançait à grand pas vers les prémices des soirées silencieuses et l’hiver au gel cassant et craquant.

Ma besace se refermait sur mon trésor, le passé et le présent s’entrelaçaient inlassablement, c’est certain personne n’imaginait la profondeur de ma richesse, la bonté de pommier.

Personne pour lire dans mes yeux embués le sublime, la reconnaissance de l’instant.

3- La pomme qui parle de la rencontre

Contrainte : avec une émotion,10 minutes

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Lorsque je la vis arriver, petite frêle, sans age, toute de noir vêtue, simplement armé d’un bâton, non pour moi mais pour la soutenir, de suite la reconnaissant j’eus ce soubresaut de l’Amour.

Pourvu qu’elle me choisisse, elle, la vielle sans nom que je devinais si douce aux mille secrets et mille savoir faire

Qu’elle me choisisse, moi, la presque sauvage inaccessible

Je savais qu’elle me sublimerait, m’aimerait pareil que moi je l’aimerais, l’aimais déjà

Je sentais pommier tressaillir, tenter de l’appeler, se pointer vers le ciel, se mirer dans le ruisseau pour qu’enfin, elle, la noiraude, la mal aimée, la rescapée, s’approche.

Dès son arrivée, je sus qu’elle me choisirait, j’étais juste mure mais pas trop, d’une belle taille, verte grise et même un peu brune, encore au pédoncule bien attachée mais ne demandant qu’à être tendrement cueillie.

Je respirais profondément, m’apprêtais à ma presque grande chute.

A sentir ses mains décharnées, ses doigts qu’on disait crochus, moi,je les imaginais simplement musclés et précis doux et affairés à la tache, c’est ça aimer.

Non ?

Il me plaisait à me dire que j’allais me nicher au creux de cette paume, souple encore et endurcie qui s’affairait aux secrets de sorcières, donnait la vie, parfois l’ôter, faiseuse d’ange également.

Je savais que, de suite, elle me couperait.

Pas n’importe comment, non, avec respect de ses mains en presque saule tortueux, de son couteau trop usé sorti de sa gibecière rapiécée

Je savais qu’elle m’observerait, essayerait d’y voir la divination du jour, partirait dans ses songes hivernaux.

Puis, je savais qu’elle planterait en moi ses quelques dents espacées,

et que moi je donnerais le meilleur : le reflet de l’amertume de la vie mais avec Amour, pour simplement ne jamais oublier notre part d’éternité.

Et surtout

je savais qu’elle me dirait merci, qu’elle me serrerait encore un peu, garderait ma moité

Moi bien sûr, je m’apprêtais à garder sa moitié,

à être un instant, un instant seulement :

sa moitié

Comment pouvait-il en être autrement ? je l’aimais, simplement, dans sa différence.

Je savais ma moitié, notre moitié, pour ce soir à la veillée, la guérisseuse, la passeuse d’âme, se remémorait cet instant libérateur, mystère de notre rencontre :

le bonheur simple d’Aimer l’autre comme il est, l’attachement et le détachement, l’explosion de vie et de mort qui rode et tout notre ensorcellement…..